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Conseillé par Yv6 mai 2019
Roman touffu, très fouillé qui recèle une foultitude d'informations, de descriptions de l'état de la Colombie, de la violence qui y règne. Santiago Gamboa aime son pays et le critique donc d'autant plus aisément. Il parle de la corruption, de la prostitution, de la drogue, des riches qui s'enrichissent, s'isolent et laissent les pauvres s’appauvrir. Ces pauvres qui souvent, n'ont plus rien à quoi se raccrocher sauf à leur foi, les églises pullulent, chacune avec ses pasteurs qui prêchent pour attirer les foules et donc leur pouvoir et l'argent. Santiago Gamboa décrit aussi les paysages colombiens, les campagnes, mais aussi les villes et principalement Cali. On le suit pas à pas, jamais très vite, car il part sur pas mal de digressions intéressantes, puis sur des enquêtes secondaires ou qui semblent l'être. Pour ne pas être largué, il faut prendre son temps, mais ce n'est que pour le bien du lecteur, qui, ainsi, passera plus de temps avec Julieta et Johana, les personnages principaux du roman.
J'ai beaucoup aimé le ton direct du romancier, qui lorsqu'il décrit ses deux héroïnes le fait dans un chapitre à elles consacré, intitulé simplement "Personnages". Son récit, bien que souvent interrompu par des remarques, digressions, rebondissements, fausses pistes, est limpide et se suit avec beaucoup de plaisir. L'humour y est présent, dévastateur, sarcastique. Le ton adopté, l'ambiance donnent à cette histoire une force supplémentaire, ce petit plus qui fait d'un roman noir – qui aurait pu n'être qu'un parmi les autres – un roman noir à part, avec un message, un supplément d'âme.
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Conseillé par o n l a l u28 avril 2019
Une invitation au voyage
La Colombie n’est pas guérie de toute violence, mais elle n’a pas plus cette
réputation de coupe-gorge du temps des cartels de la drogue ou de la guérilla
des Farc. Le pays est suffisamment pacifié pour qu’un écrivain puisse y situer
un polar classique, où la justice et la police reviennent aux affaires
courantes : enlèvements, disparitions, fusillades, meurtres. Santiago Gamboa
fait ce constat paradoxal d’un retour aux crimes ordinaires dans un roman
aussi enlevé qu’un air de salsa et aussi relevé qu’un condiment aux piments
rouges. « Des hommes en noir » respecte les lois fondamentales du genre, avec
deux héros juste assez tourmentés pour nous sembler proches, des personnages
secondaires bien typés et une galerie de gros bras pittoresques. La police
colombienne ne s’étant pas encore refait une virginité, ce sont un procureur
et une journaliste qui mènent l’enquête. Un curieux attelage en rupture de vie
familiale, lui maniaque et solitaire, elle portée sur la bouteille et les
rencontres d’une nuit.