Ouvrir son coeur

Alexie Morin

Le Quartanier

  • 31 octobre 2019

    « Quand rien ne sort, les autres ne peuvent pas comprendre de quoi il s’agit. {…} il me faudrait écrire les mots sur un bout de papier. Il y a aussi le moment, qui vient, un peu avant ou un peu après le mutisme, où je ne peux non plus parler parce qu’instantanément je pleurerais, à cause de ce surplus d’émotions et de sensations dont le mélange ne porte pas de nom connu, et de frustration, parce que les mots refusent de s’aligner, les phrases s’enfoncent toutes en même temps dans ma tête, l’une par-dessus l’autre. »
    C’est le journal d’Alexie Morin. Des pans entiers de sa vie qui se déroulent uniquement dans sa tête, difficile voire impossible de montrer ce contenu. Elle distingue l’estime de soi et la confiance en soi. Parfois elle accède à des états de grâce qui laissent des traces. C’est l’écriture. Avec elle, elle crée quelque chose de beau. Ouvrir son cœur, signifie se confier. Un travail émotionnel, un travail de régulation, de contrôle. « Ce contrôle m’a toujours manqué. » Les autres lui sont étrangers.
    « Ouvrir son cœur, au sens littéral, ça évoque d’autres images. Ça saigne, ça fait peur. Ça peut être sale, noir, poisseux. Ce n’est pas un spectacle très digne, surtout quand la personne qui l’offre est une femme. Le sujet de ce livre, l’un de ses sujets, c’est la honte. »
    Parfois, elle n’a plus en elle les ressources émotionnelles nécessaires pour encaisser la moindre défaite. La colère fait crier des mots qui dépassent la pensée. Ou peut-être s’agit-il du fond de la pensée ? La colère quand elle parvient à s’échapper dévaste au passage. Alors, elle écrit...mais elle ne termine aucun texte. « Finir quelque chose, c’était l’abandonner. »
    C’est le carnet de celle qui lit beaucoup. Celle qui observe les autres qui se détachent d’elle Les autres sont une petite nuée d’oiseaux qui se dilate et se contracte. Une nuée qui l’attrape puis la rejette.
    Elle est du côté du manque, mais aux autres aussi il manque quelque chose, quand on veut tous être pareils, tous unis. Elle est une.
    Ouvrir son cœur d’Alexie Morin, Le Quartanier.