One-shot, Les Mains de Ginette

Marion Duclos

Delcourt

  • Conseillé par (Le Bateau Livre)
    25 mars 2021

    BD maline et magnifique !

    Marcelin adore les mains des femmes, qu'elles soient longues, courtes, potelées, vernies... Il tient même une boutique de gants Mappa ! Et un jour, il rencontre Ginette. Et ses mains, OH SES MAINS ! Quelles mains incroyables ! Du jamais vu !
    Et les voilà qui se marient, pour le meilleur, et pour le pire...

    Une BD chatoyante de couleurs, qui ne saurait nous tromper sur la terrible nature de son sujet : les violences conjugales, la jalousie et la possessivité. Très malin !


  • Conseillé par (Librairie La Grande Ourse)
    24 mai 2021

    Des mains pas si douces que cela

    Il ne faut jamais croire aux dessins de couverture. Encore moins aux couleurs douces et acidulées. Ni au titre. « Les mains de Ginette » est il écrit. Et des gants, plein de gants, de toutes les formes, de tous les usages est il dessiné. Comme dans un conte pour enfants.
    Pourtant un détail étonne: au milieu de ses gants, en subrillance, apparait une forme orange, presque rouge, violente: une pince de crabe. Un intrus. Une alerte.
    Et puis Olivier Ka est mentionné comme scénariste. Si on a bonne mémoire on se souvient qu’il avait écrit le texte de la BD « Pourquoi j’ai tué Pierre » qui racontait l’histoire du dessinateur Alfred, le récit biographique d’un viol. Pas franchement une Bd pour enfant.
    Dès les premières pages, on se dit en effet que quelque chose cloche. Le dessin est léger mais de vilains enfants hurlent la haine. Une vieille femme, Ginette, est victime de ses moqueries. Muette, elle respire la tristesse, la mort. Potiche elle se traine dans les commerces du village.

    Et on continue la lecture, se demandant où l’on met les pieds, où l’on pose les yeux. Et on n’arrête plus de tourner les pages, attiré par ce puits sans fond qui nous emmène vers l’amour fou ou vers la haine? Vers le bonheur ou le malheur? On ne sait plus tant nos sens se sentent trompés, en perte de repères.
    C’est la jalousie et ses effets pervers qui se dévoilent alors au coeur de cette Bd si originale et décoiffante. Mais aussi l’amour fou, celui de Marcellin, un homme, passionnément amoureux de Ginette, de ses mains, qui glissent sur la peau pour une descente aux enfers irrespirable. La jalousie voisine toujours avec la passion, la peur de sa perte. Pour une fois ce sont les femmes qui incarnent cette crainte et la violence qui parfois l’accompagne. Mère, épouse, terrifient de leurs cris, de leurs bouches déformées. Les hommes sont un peu bêta, guère méchants, soucieux du bonheur de Marcellin, leur ami, détruit peu à peu par Ginette. C’est l’homme qui est victime de violences, une situation rare mais réelle.
    Le dessin léger de Marion Duclos, autrice notamment de Ernesto contribue au sentiment général de malaise: il est léger comme une plume, coloré comme un album de jeunesse et illustre les pires violences. Le visage de Ginette, ses cheveux d’un noir absolu terrifient le lecteur jusqu’à ce que la page devienne complètement rouge. Rouge et noir pour un album aux couleurs pastels, le symbole d’un album paradoxal et dérangeant.

    Eric