Sur des mers plus ignorées

Tim Powers

Bragelonne

  • Conseillé par
    8 septembre 2011

    Un mélange décapant de piraterie et de magie vaudou !

    Publié pour la première fois en France en 1988, « Sur des mers plus ignorées » vient de se voir rééditer aux éditions Bragelonne avec une toute nouvelle (et magnifique) illustration de couverture (parce qu’il faut avouer que les anciennes couvertures n’étaient pas folichonnes quand même !) Si le but était clairement de ressortir ce titre des oubliettes et de le remettre au goût du jour afin de surfer éhontément sur la licence Pirates des Caraïbes (que ce roman aurait inspiré), je peux, en toute honnêteté, vous dire qu’ils ont bien fait ! Car si ce roman n’a finalement pas grand-chose à voir avec « Pirates des Caraïbes - La fontaine de jouvence », reste une aventure tout à fait divertissante, mélange de piraterie et de vaudou qui fonctionne à merveille !

    Premier bon point, malgré les quelques vingt-cinq années qui séparent sa première publication et cette réédition, le roman n’a pas pris une ride. J’avoue que c’est ce que je craignais principalement, que l’aventure date et ne paraisse plus aussi exaltante. Et bien pas du tout, j’ai retrouvé avec plaisir tous les ingrédients qui font les bons romans de flibuste : du rhum, des bagarres, des scènes d’abordage, des poursuites en mer, des répliques gouailleuses, et même... des poulets !

    J’en vois qui ricane. Des poulets, vraiment ? Et bien oui, et c’est le second bon point de ce roman, l’idée ingénieuse et unique qu’a eu Tim Powers de combiner l’univers de piraterie à celle de la sorcellerie vaudou. Ce joli mélange apporte un côté loufoque au roman, qui alterne entre les scènes de magie noire avec fantômes, zombies, incantations et rituels oubliés à la clé, et les scènes fidèles à l’esprit des forbans du XVIIème siècle, où camaraderie rimait avec beuverie et baroudeur avec écumeur.

    Il faut dire que Tim Powers nous sert une belle brochette de corsaires, sans scrupules et malhonnêtes, au milieu desquels son héros, Jack Shandy, se retrouve parachuté un peu contre son gré (c’est les rejoindre ou mourir !) Du moins, en apparence. Car les scélérats ne sont pas forcément ceux qu’on croit, et filoutera bien qui filoutera le dernier... De nombreux rebondissements sont au programme, des retournements de situations qui nous embraquent complètement dans l’intrigue, et l’action ne se relâche pas une seconde. Un petit regret tout de même en ce qui concerne le fameux boucanier Barbe Noire, qui fait bien pâle figure dans ce roman et se retrouve cantonné à un second rôle immérité (le capitaine Davies ayant beaucoup plus de « gueule » ici). Et ne parlons pas du poncif de « la fille-qui-ne-sert-strictement-à-rien-à-part-d’être-sauvée » dont je me serai bien passée, mais bon je fais ma fine bouche.

    Quant au style de Tim Powers, il est alerte et très réaliste, avec une profusion de termes maritimes qui mettent agréablement dans l’ambiance sans la plomber.

    En bref, un roman divertissant où l’aventure s’invite à table, entre une bonne grosse louche de flibusterie, une cuillerée de sorcellerie vaudou et une pincée de filouterie. Ajoutez-y des poulets vaudous, une intrigue dynamique et des réparties savoureuses, et vous aurez le roman parfait pour vous détendre sans vous prendre la tête, tout en savourant un punch sur le pont du Vociferous Carmichael. A l’abordage !